L'audit qualité : pour une vraie efficacité
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sujet est repris et détaillé dans les
différents livres de l'auteur (cliquer ici)
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personnelle.
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bien vouloir citer le Cabinet en référence. Merci !
Texte inspiré
et adapté à partir d'un article de Christian DOUCET paru dans Qualité
références
Voir aussi le fiche
pratique résumée sur l'audit qualité fonctionnel
Introduction
La logique générale de l'audit
Les différentes types d'audits qualité
L'audit qualité interne
Le déroulement de l'audit
L'audit seconde partie
L'audit tierce partie
Conclusion
En fait, les audits
qualité pâtissent de ce qu'ils sont
axés surtout vers le contrôle
formel du SMQ, et non sur la qualité du fonctionnement lui-même,
même si la version 2000 fait évoluer cette conception.
Paradoxalement, c'est
d'abord contraire à la qualité elle-même, qui est avant tout la recherche
d'un résultat : le "zéro défaut", l'efficacité, la souplesse, au service
du client (interne ou externe). Placer la conformité
en priorité par rapport aux résultats revient au contraire à rigidifier
les structures et à mobiliser les personnels sur les moyens et non plus
sur les objectifs : une personne ne dot pas se
faire sanctionner davantage parce qu'elle n'a pas signé un procès-verbal
d'analyse que parce que l'analyse elle-même est inexacte ; une entreprise
ne doit pas avoir une non-conformité plus forte
parce qu'elle n'a pas de document sur un des points de la norme que parce
que son SAV (service-après-vente) a été déplorable pendant l'été… Il faut
rétablir l'importance réelle de chaque chose, même si le souci de méthode
et de rigueur doit être préservé.
Il faut que les bonnes
règles soient respectées, mais il faut savoir aussi ne pas appliquer les
mauvaises. L'efficacité doit primer sur la conformité formelle. Si une
pratique n'est pas bonne, elle doit être corrigée.
Par ailleurs, les audits
centrés sur le contrôle pointilleux des procédures ne peuvent pas détecter
les vrais problèmes car ils ne se situent pas au bon niveau. Leur
efficacité est donc réduite comparée aux efforts fournis et au temps qui
leur est consacré. L'accueil par les audités n'est
également pas bon car ils n’admettent pas que les auditeurs s’attachent à
des détails de peu d'importance alors que les problèmes journaliers de
fonctionnement ne sont pas abordés.
En retour,
ces audits sont peu valorisants pour les auditeurs,
et on constate fréquemment qu'il est difficile de les faire réaliser. On
est souvent forcé de les transformer en "gentils" contrôles, faits
uniquement pour la certification. La mécanique tourne dès lors à vide et
ne se justifie plus du tout.
Retournons aux sources…
Notons que ceci est
directement transposable à l'environnement ou à l'hygiène
et la sécurité, les objectifs se déclinant directement : détection
des risques pour l'environnement dans le premier cas, pour la santé et la
sécurité des salariés dans le second cas. L'audit peut bien sûr englober
plusieurs de ces domaines simultanément sans inconvénients, sous réserve
d'une compétence suffisante de l'auditeur.
Fondamentalement, l'audit
qualité est une méthode d'évaluation de risque concernant une activité ou
un produit donné, grâce à un examen détaillé de son processus de
réalisation. Il porte essentiellement sur l'organisation et les méthodes
de travail et doit déboucher sur des propositions permettant de supprimer
les dysfonctionnements et les risques avérés.
Nous disons "risques
avérés", car l'erreur la plus fréquente est ce qu'on peut
appeler la "risquite", c'est-à-dire la mise en relief de risques
négligeables, qui conduit à prendre des précautions inutiles. Pour éviter
cela, il faut commencer par bien identifier d'une part le besoin auquel
doit répondre l'activité et les risques essentiels à éviter. On centrera
ensuite l'audit sur ces points, quitte à entrer plus dans le détail une
fois que ces risques majeurs seront résolus.
Prenons un exemple : la
gestion d'un stock de produits
finis disponibles à la vente dans une entreprise de négoce. Une analyse
préliminaire, fondée sur l'examen des incidents survenus dans une période
récente et sur la nature et le cadre général du stockage, doit permettre
d'identifier les risques majeurs. Nous retiendrons ici le risque de
rupture de stocks, dans la mesure où on en aura constaté un certain nombre
dans un passé récent (mais nous pourrions tout aussi bien prendre le
risque de vol, d'explosion — pour les produits instables —, de pollution,
etc.).
L'objectif est alors
d'identifier le "champs" à couvrir par l'audit, soit
toutes les opérations et tous les paramètres qui peuvent conduire à
une rupture de stocks. Cela conduit généralement à identifier un ou
plusieurs processus de travail, qui sont ici les suivants :
- le suivi du stock ;
-
le suivi des historiques de consommations,
qui donnent généralement des indications sur les consommations à venir ;
-
les prévisions commerciales, qui complètent
et permettent de préciser les historiques précédents ;
-
l'exploitation de ces données pour
déterminer les besoins en réapprovisionnement ;
-
la politique d'achat, le nombre et la
qualité des fournisseurs, la prise en compte des cours des matières
premières, etc. ;
-
l'offre du fournisseur, ses délais
notamment ;
-
la passation de la commande ;
-
l'approvisionnement, le contrôle des
produits et leur stockage en magasin.
Il convient de se poser par exemple les questions
suivantes, sachant que celles-ci résulteront de la préparation de
l'audit et varieront d'un cas à l'autre.
- L'analyse des
incidents : quels
sont les produits
le plus souvent en ruptures de stocks ou quels produits
risquent le plus de l’être, quelle a été la cause des ruptures
constatées ?… Cela permettra d'orienter la suite de l'analyse — l'audit
ne se limitera toutefois pas à ces causes directes, il doit traiter
l'ensemble du sujet, sous peine de se transformer en simple enquête
technique —.
-
Le suivi du stock : le connaît-on de façon
précise, y a-t-il des stocks minimums, comment sont-ils déterminés ?…
-
Le suivi des historiques de consommations :
dispose-t-on d'un tel historique, dans quelle mesure est-il exploitable,
les ventes sont-elles régulières d'une année sur l'autre ?…
-
Les prévisions commerciales : dans quel
domaine les commerciaux sont-ils en mesure de faire des prévisions
fiables, comment améliorer cette fiabilité ?…
-
La détermination des besoins en
réapprovisionnement : comment cette évaluation se fait-elle ? la
personne est-elle suffisamment formée, a-t-elle de bons contacts avec
les commerciaux ?…
-
La passation des commandes : comment
choisit-on le fournisseur, prend-on
en compte ses délais de livraison annoncés, tient-on compte de sa
qualité (ou achète-t-on au moins cher), suit-on les commandes et
assure-t-on des relances en cas de retard ?…
-
L'approvisionnement et le magasinage : les produits
sont-ils contrôlés, applique-t-on le "FIFO[1]",
existe-t-il des risques de détérioration ou de perte en magasin ?…
Principales caractéristiques des différents types d'audits
Les différentes
modulations de l'audit qualité interne :
Tout audit a ces trois
dimensions, mais en
modulant leur importance relative, on obtient une grande variété
d'audits, qui permettent de s'adapter aux différentes situations. On
trouve ainsi par exemple les
cinq types d'audits qualité internes suivants, sachant que toutes
les combinaisons et tous les intermédiaires sont possibles.
o
Les audits
"découvertes" : ce sont les audits
interservices, lorsque
le commercial est audité par la fabrication, l'après-vente par les achats…
Ces audits présentent le grand intérêt de faire découvrir les autres
Services et de renforcer la compréhension par chacun des problèmes et des
contraintes des autres. Ils peuvent aussi être utiles pour les nouveaux…
Ce sont des audits axés sur la dimension informative. On ne leur demande
pas d'améliorer ou de mener des contrôles élaborés (les auditeurs n'y sont
généralement pas aptes).
o
Les audits
"d'améliorations" : ce sont les audits menés sur une activité
qui fonctionne mal, dans le but de réfléchir aux améliorations. Ces audits
doivent être menés par des auditeurs compétents et expérimentés dans le
domaine concerné (nous parlons bien du domaine "organisationnel", par
exemple le commercial, les études… et non du domaine technique). Dans les
cas difficiles, des auditeurs externes peuvent être la bonne solution. Une
participation de la Direction est souvent souhaitable.
o
Les audits de
"contrôle" : ils portent sur les points
dont on n'arrive pas à faire respecter les règles, par exemple le
rangement des dossiers, la propreté ; le port des équipements de sécurité,
etc. Ces audits seront souvent ponctuels. Ils seront effectués par
des personnes rigoureuses et ayant une bonne connaissance "technique" du
problème. Ils pourront être répétés régulièrement, par exemple tous les
mois, toutes les semaines… jusqu'à ce que les bonnes habitudes soient
prises. Notons qu'il s'agit bien d'audits et non seulement de contrôles.
Ils doivent conserver une certaine dimension d'analyse des causes du
dysfonctionnement et de proposition d'améliorations, à partir des
suggestions recueillies.
o
Les audits de
"surveillance" : ce sont les audits menés régulièrement sans raison
précise, pour vérifier le bon fonctionnement d'une activité, de façon à
détecter les amorces de dérives et les problèmes sous-jacents, qui
n'apparaissent pas. Ils sont un peu la synthèse des précédents, sans
spécialisation précise. Ils peuvent être menés régulièrement (une fois par
an,
par exemple).
o
Les audits de
"pré-certification" : ces audits seront axés sur la vérification du
respect des normes et le rappel des exigences de celle-ci, la tenue à jour
des procédures et leur application, la bonne mise en œuvre des actions
décidées… Ils peuvent se combiner utilement avec les audits précédents de
façon à maintenir le certificat. Cette partie de l'audit peut être assurée
par exemple par le responsable qualité ou un bon spécialiste de la norme;
qui sera membre de l'équipe d'audit.
La qualité d'un audit
qualité repose sur quatre bases essentielles :
- la qualité et la
formation de l'auditeur (nous y reviendrons en fin de cette partie)
;
-
la préparation de l'audit ;
-
la méthode d'audit ;
-
le suivi de l'audit.
La préparation de l'audit
La préparation de l'audit
constitue
la partie essentielle de son déroulement. Ses buts sont les
suivants.
- Prendre
connaissance de l'activité : pour cela, on lira les différents
documents qui la présentent et la régissent : note d'organisation,
procédures et méthodes la concernant, rapport d'activité, notes
d'études, normes… On doit arriver en connaissant déjà un minimum
l'activité, de façon à éviter que l'audit ne soit seulement consacré à
des présentations générales et à pouvoir mener des investigations
utiles.
Quelques questions à se poser : en quoi
consiste l'activité.
Quel est son "client".
A quel besoin répond-t-elle.
Quels sont ses aspects critiques ?
- Identifier les
problèmes, c'est-à-dire les sujets à traiter précisément : pour
cela, on collectera toutes les informations disponibles : indicateurs
qualité, fiches d'incidents, audits précédents,
comptes rendus d'avancement… On pourra aussi contacter les
clients internes, afin de connaître leurs attentes et leurs sujets
d'insatisfaction. Cela permettra de cibler précisément les questions à
aborder : l'audit est en effet à orienter en priorité sur la recherche
des causes puis des solutions des problèmes déjà connus (d'autres
problèmes pourront
s’ajouter au cours de l'audit).
Cette partie
est souvent la plus difficile à mener, notamment lorsque la gestion de
la qualité n'est pas très poussée. On manque alors d'informations
fiables. Dans ce cas, cela fait partie de l'audit que de proposer les
améliorations souhaitables pour mieux mesurer la qualité de l'activité.
Dans les cas où
l’on dispose de trop peu d'informations, l'audit peut être
précédé d'une enquête auprès de
tout le personnel du service audité et de ses clients.
Les employés expriment ainsi les problèmes rencontrés et
proposent les solutions jugées adaptées à leur niveau. Cette enquête
sera exploitée directement par l'auditeur, sans passer par la hiérarchie
intermédiaire. Il en fera toutefois ensuite un rapport précis, en
occultant les noms des personnes ayant émis des critiques ou des
suggestions (sauf accord de leur part).
- Organiser l'audit
: définir les personnes qui seront présentes. Ces personnes peuvent être
dissociées en trois groupes :
-
l'équipe d'audit, soit le responsable
d'audit et éventuellement un ou plusieurs auditeurs spécialisés (par
exemple : spécialiste technique, expert des normes et règlements
applicables…) ;
-
les audités, représentés généralement par
leur encadrement, mais avec une implication des personnels lors des
visites de terrain ;
-
les personnes associées, soit les autres
parties concernées par l'activité ou par les décisions à prendre : ce
peut être le ou les clients internes, la direction… Il est en
particulier très souhaitable que les décideurs impliqués et tous les
partenaires de l'activité soient là : les problèmes seront ainsi
examinés de façon efficace et les décisions pourront être prises
directement en séance (on constate que sinon il faut
ensuite pratiquement recommencer l'audit à l'attention des
décideurs — que les décisions traînent ou ne sont jamais prises). La
participation de ces personnes peut être partielle, par exemple se
limiter à la réunion de synthèse finale ;
Une visite de
préparation permettra de récupérer les documents nécessaires et de
planifier l'audit. Dans les cas complexes, un programme d'audit
sera établi et diffusé,
chacun pourra ainsi réserver les dates.
La méthode d'audit
Le déroulement général de l'audit :
a)
la réunion
de démarrage :
On commencera en général
par une réunion ayant plusieurs buts :
- organiser en détail
l'audit et confirmer son déroulement
-
avoir un exposé d'ensemble sur l'activité,
ses objectifs, ses enjeux, la logique générale de l'organisation et des
mesures prises, les difficultés rencontrées.
Cette réunion sera une
première occasion de discuter des constats généraux soulevés par la
préparation ou ressortant des exposés.
b)
L'audit de
"terrain"
Après cette première
étape, on entame des visites sur le terrain, en suivant le sens normal de
la chaîne de travail, depuis l'arrivée des pièces ou ordres de travail
jusqu'à la fourniture finale au client interne ou externe. Les objectifs
sont les suivants :
- connaître et
comprendre le fonctionnement des travaux et les conditions réelles du
travail ;
-
connaître et comprendre la position et les
suggestions des personnes de terrain ;
-
étudier les raisons des dysfonctionnements
(notamment ceux déjà diagnostiqués lors de la préparation) ;
-
vérifier l'application des consignes, le
rangement, la propreté… par sondage (en fonction de l'objectif de
l'audit).
Seul un groupe restreint
participera à cette visite. Dans les cas complexes, elle sera répartie en
plusieurs groupes, chacun emmené par un auditeur sur un sujet déterminé.
c)
La réunion
de conclusion
L'objectif de cette
réunion est de tirer les conclusions de l'audit et de préparer les
propositions en commun avec les différentes parties (personnes
auditées et associées). Si la situation est suffisamment claire, on peut
tenir la réunion de conclusion immédiatement. Sinon, il est raisonnable de
prendre un peu de temps pour exploiter les informations recueillies et
préparer un projet de rapport qui sera soumis au groupe plénier réunissant
toutes les parties.
Ce rapport doit mettre en
évidence les problèmes essentiels, leurs enjeux et les différentes
solutions possibles avec leurs options. Si des désaccords apparaissent
dans le groupe, les propositions de chaque partie seront reprises. Les
décisions à prendre doivent apparaître clairement, avec tous les éléments
permettant aux décideurs de les prendre en toutes connaissance de cause.
La présence des décideurs à la réunion de conclusion permet toutefois de
simplifier cette étape, qui peut être lourde, et de prendre directement
les décisions, le
compte rendu devenant alors un relevé des actions décidées avec
leur détail : qui fait quoi, pour quand…
Quelques conseils pour mener l'audit
Nous donnerons les
conseils suivants :
-
Être globalement en position d'écoute et
de médiation : les solutions
ne doivent pas venir de l'auditeur mais des audités, le rôle de
l'auditeur étant essentiellement de mettre à plat les problèmes, d'en
faire envisager tous les aspects (y compris économiques, réglementaires,
sociaux… le cas échéant), de recueillir toutes les suggestions, de les
évaluer et de les affiner en fonction de son expérience et de sa
connaissance du sujet.
On sait en particulier qu'un "œil neuf" voit
souvent plus clairement les problématiques que ceux qui y sont plongés
chaque jour et qui sont soumis aux contraintes permanentes du court terme.
L'auditeur extérieur peut également dépassionner les débats et les poser
objectivement (bien des difficultés ne sont dues qu'à des conflits de
personnes). Ce sont là des intérêts majeurs de la technique de l'audit.
Mais on ne dira jamais assez que l'efficacité
de l'audit repose avant tout sur la qualité de l'auditeur. Si
l’on veut des audits de haut niveau, il
est indispensable de désigner des auditeurs
qualifiés et, plus généralement, de choisir le bon auditeur pour
chaque audit. Le recours à des experts extérieurs confirmés est aussi
souvent une bonne solution.
o
Suivre la
conversation et aborder les problèmes au fur et à mesure qu'ils se
présentent. Un bon auditeur a sa
check-list d'audit
à portée de main et ne la consulte que périodiquement afin de
détecter ses oublis, qu'il essaiera d'aborder dès que la réunion se
rapprochera du sujet. Canaliser les entretiens en suivant un questionnaire
les stérilise en ne permettant pas à l'audité de suivre son raisonnement.
Le bon auditeur reste l'esprit en éveil, de façon à détecter les
incohérences, à bien comprendre les problématiques et à pouvoir juger des
bonnes ou mauvaises suggestions reçues en fonction des nombreux paramètres
à prendre en compte.
o
L'auditeur
doit être assez psychologue et habile pour "faire parler",
c'est-à-dire pour briser la barrière qui se dresse inévitablement devant
un "intrus" qui connaît
a priori mal l'activité. Cette capacité à surmonter les
réticences et à engager un dialogue "ouvert" et franc repose en partie sur
la préparation amont de l'audit (elle est d'autant plus facile que l'on
connaît déjà l'activité et que l'on peut en parler sans trop d'erreurs)
mais aussi sur la technique d'entretien :
l’objectif est que l'interlocuteur s'implique et arrive jusqu'aux
causes réelles des problèmes, sans en rester à la "langue de bois"
courante des relations hiérarchiques ou sociales. Pour cela, quelques
"trucs" :
-
Rendre l'audit "positif" en évitant toute
critique et en l'orientant résolument vers la recherche des solutions
face aux dysfonctionnements.
-
Prêcher parfois le faux pour connaître le
vrai
-
Écouter toutes les parties : si quelqu'un
en critique un autre, écouter également ce dernier : la vérité
avancera de la confrontation des points de vue
-
S'appuyer autant que possible sur des
faits, en demandant à chacun d'étayer ses affirmations par du concret,
exemple : vous dites qu'il y a beaucoup de retard : combien de fois
(approximativement) dans la semaine, avec quels clients, quelles
conséquences précises ont-ils eu, pouvait-on réellement les éviter et
comment ?…
Mais la
personnalité de l'auditeur joue aussi. Un mauvais communicant, une
personne peu réfléchie
ou trop préremptoire seront par exemple aussi généralement de
mauvais auditeurs…
- Pour chaque
problème, examiner les possibilités de solution avec les intéressés,
à partir de leurs suggestions et en tenant compte de l'expertise et de
l'expérience de l'auditeur, qui va éventuellement les guider. L'objectif
de l'audit n'est
pas en effet de lister seulement des problèmes, mais bien de
proposer des solutions viables.
Mais
il convient de toujours avoir à l'esprit que les problèmes de
qualité sont par nature complexes à résoudre. S'ils ne l'étaient pas,
ils auraient été déjà résolus. Exemple : on constate que les outillages
sont mal rangés alors que cela en améliorerait la tenue en bon état et
l'entretien. La solution paraît évidente : demander le rangement
régulier. Or il est évident que, si le "chef" en poste est compétent
(s'il ne l'est pas on change de problème, sans doute pour en découvrir
un encore plus complexe…), il a déjà demandé ce rangement. S'il n'est
pas obéi, c'est que les difficultés sont plus profondes qu'il n'y
paraît, par exemple, un défaut de responsabilisation des ouvriers —
que l’on pourra rectifier par exemple en attribuant à chacun ses
outils — , un rangement mal commode, des problèmes de management de son
équipe par le chef, voire une résistance larvée des ouvriers due à des
conflits sociaux… Face à un problème, il faut donc en étudier les causes
avec soin et trouver les solutions en concertation, car c'est ainsi
seulement qu'on saura le résoudre.
Dans les cas
trop complexes, l'audit se limitera d’ailleurs à poser le problème et à
initier un projet destiné à l'étudier en détail. Encore faut-il essayer
d'en jeter les bases aussi clairement que possible.
- Valider au mieux
les réponses données en s'appuyant sur des éléments objectifs. On
n'a pas toujours le temps de le faire de façon précise, mais
on vérifiera par sondage, par recoupements auprès de plusieurs
interlocuteurs, par relecture des dossiers après l'audit (ou demande
d'informations complémentaires)… On essaiera en particulier toujours de
trouver des indicateurs chiffrés, quitte à les élaborer soi-même
sur un échantillon réduit. Cela permettra d'éviter les erreurs
d'appréciation et rendra les discussions avec les audités plus
objectives et plus faciles.
Il est aussi
fréquent que chaque partie essaie d'influencer l'audit dans le sens de
ses propres intérêts. L'auditeur doit rester neutre et éviter de prendre
partie.
Pour cela, ramener les interlocuteurs aux réalités objectives est une
méthode qui produit de bons résultats... C'est comme cela qu'on
aboutira le mieux à des compromis "viables", c'est-à-dire acceptés.
Le rôle du référentiel : le "référentiel"
ne doit pas être considéré comme un "absolu"
mais comme l'un des éléments à auditer
On ne saurait terminer
sans parler du "référentiel", qui est placé au centre de l'audit par la
qualitique actuelle, qui donne pour mission à l'auditeur
de vérifier principalement la conformité.
Cette approche doit être
considérée avec du recul : les règles écrites sont effectivement une
référence,
mais en qualité, l'obligation de chacun ne doit
pas être de suivre aveuglément les
règles mais au contraire d'obtenir la qualité (le mot de "référence" est
d’ailleurs bien choisi car il montre bien qu'il s'agit de recommandations
et non de règles impératives). Les règles ne sont qu'une aide. Si elles ne
permettent pas de travailler correctement, elles doivent être modifiées
(et c'est l'un des buts
de l'audit). Le référentiel ne doit ainsi pas être appliqué sans
discernement mais amélioré sans cesse pour bien correspondre aux besoins
Dans un bon système qualité, le référentiel doit ainsi pouvoir évoluer
très rapidement, en limitant les formalités
d'approbations à l'essentiel.
Plus précisément, en cas
de non-respect du référentiel, il y a deux possibilités :
- soit les règles sont
bonnes et leur non-respect (ou leur mauvaise interprétation) entraîne un
risque "avéré" (c'est-à-dire démontré) de non-qualité :
il convient de les appliquer. Il s'agit toutefois d'un problème
de discipline qui est du ressort de la hiérarchie, car c'est à la
hiérarchie de faire appliquer les règles de travail et non, par exemple,
au service qualité ;
-
soit les règles sont inadaptées et ont été
déviées de façon à pouvoir travailler correctement :
il faut penser à modifier les règles.
Le suivi de l'audit : la mise en oeuvre
rapide des actions décidées est essentielle
Le
choix et la formation des auditeurs
Il est évident
qu'une certaine pratique
est nécessaire pour être un bon auditeur, et le
choix des auditeurs est essentiel. comme nous
l'avons vu,
sa personnalité et ses compétences sont décisifs.
D’ailleurs, à chaque types d'audits correspondes différents besoins et
donc différents niveaux d'auditeurs. Sachons choisir le bon
auditeur sur chaque sujet, et n'en demandons pas plus à l'auditeur qu'il
ne peut.
L'audit seconde partie
est typiquement l'audit d'un fournisseur par son client. C'est ce cas que
nous retiendrons ici. Il peut usuellement se produire dans trois cas :
- pour l'évaluation
initiale d'un nouveau fournisseur ;
-
pour un suivi régulier ;
-
lors d'un problème.
Il est évident qu'il faut
le réserver aux fournisseurs importants ou à problèmes.
Ces audits suivent dans
l'ensemble les règles précédentes. Nous ne reprendrons que leurs
particularités.
Les audits d'évaluation initiale
L'audit a pour but
d'évaluer si le fournisseur est apte à réaliser les travaux demandés et,
si des risques sont détectés, à envisager les préventions possibles.
L'évaluation porte généralement sur les
cinq aspects suivants.
o
L'aptitude
technique générale du fournisseur : ses machines, ses compétences, ses
réalisations passées, son expérience.
o
Sa capacité à
maîtriser les points critiques techniques associés à la prestation. A
cet effet on aura identifié au préalable ces points à partir du cahier des
charges et des technologies employées par le fournisseur, le cas échéant
après expertise d'un échantillon.
o
Son
organisation et les garanties de qualité qu'il apporte. Dans ce but,
il faut identifier les risques essentiels relatifs à la fourniture
demandée, exemples : maîtrise des fournisseurs de matières, propreté des
ateliers, gestion des modifications, gestion de projet,
etc. On aura demandé au préalable une présentation des dispositions
qualité prises via par exemple le remplissage d'un questionnaire, la
fourniture d'un plan ou d'un manuel qualité… et on les évaluera déjà en
bureau de façon à préparer l'audit, qui portera ensuite surtout sur ces
points critiques.
Comme déjà
indiqué en début, on ne prendra en compte un certificat ISO 9000 ou
analogue que dans la mesure
où la confiance dans l'organisme certificateur est avérée.
o
La
satisfaction des exigences particulières, par exemple : assurance
vis-à-vis des matériels mis à disposition, respect des règles de sécurité
pour les transports… (ces éléments doivent être indiqués dans la
consultation).
o
La mise en
œuvre de l'approvisionnement : type de commande et de contrat, mode de
transmission des informations, organisation des livraisons, cotation
qualité prévue et audits de suivi…
L'équipe d'audit sera
constituée typiquement de l'acheteur, d'un technicien du domaine et d'un
spécialiste "organisation", en général de l'équipe qualité.
On peut rappeler les
contraintes à respecter, déjà énoncées dans le tableau dressé
précédemment :
- Respect du cadre
contractuel. Il faut bien entendu prendre pour base le contenu de la
Consultation et du cahier des charges, en évitant toutes déviations.
S'il s'agit en
particulier d'une consultation avec mise en concurrence, il est
indispensable d'établir une grille précise d'évaluation et de s'y tenir,
chaque auditeur faisant séparément son évaluation, avec des notes
chiffrées et une synthèse à la fin. Il ne faut pas fausser la
compétition en avantageant l'un des compétiteurs, par exemple en lui
donnant plus d'informations qu'aux autres. Il faut fournir au décideur
final des éléments de décision objectifs.
- Respect des droits
et des responsabilités de l’organisme audité : il faut se limiter à
l'évaluation des risques et à tout ce qui se rapporte directement au
contrat et à l'approvisionnement. On ne doit porter de jugement sur
l'organisation interne et les méthodes du fournisseur que dans la mesure
où cela entraîne des risques directs pour le client.
Comme dans le
cas de l'audit interne, l'audit seconde partie doit être participatif :
les constats et les propositions doivent être discutés
avec le fournisseur et les différentes positions doivent être clairement
reportées.
Si l'audit est
satisfaisant et si le fournisseur est choisi, il est alors "agréé" et
placé dans la liste des fournisseurs
auxquels on passe des commandes régulièrement.
L’idéal est que cet agrément se poursuivre par la mise au point
d'un véritable partenariat avec le fournisseur, avec une information
réciproque et la prise en compte des intérêts respectifs. Par exemple
l'information par le client sur les futures grosses commandes ou les
urgences prévisibles, de façon que le fournisseur s'y prépare, et
inversement, l'avertissement du client par le fournisseur en cas d'ennui
de nature à contrarier les livraisons. Il ne peut pas y avoir
réellement d'assurance qualité par la suite si un tel partenariat continu
n'est pas en place.
On constate que les pratiques actuelles s'éloignent souvent de ces
"règles de l'art". Elles sont pourtant indispensables
à la mise en place d’une réelle assurance de la qualité des
approvisionnements. Rappelons bien que le but des audits qualité
fournisseur n'est pas de vérifier qu'ils sont conformes à un référentiel,
mais qu'ils sont aptes à devenir des partenaires sûrs de l'entreprise, ce
qui est indispensable pour sa propre activité.
Le tableau ci-contre
résume la logique globale de l'évaluation.
La logique générale de l'évaluation
qualité dans le cadre d'une mise en concurrence
Les audits de suivi
Un audit "seconde
partie"de suivi peut être réalisé dans deux cas :
- soit de façon
régulière, pour prévenir les dérives, ceci notamment auprès des
fournisseurs critiques, par exemple ceux avec lesquels on travaille en
juste à temps, sans stock ni contrôle d'entrée ;
- soit à la suite
d'incidents répétés.
L'équipe d'audit peut
généralement être réduite, en fonction du type de problème à traiter : un
audit de simple suivi sera fait par le seul responsable qualité
fournisseur, l'acheteur interviendra en cas de grave dysfonctionnement, un
technicien en cas d'ennui technique.
L'audit
se prépare par l'examen de l'historique de l'approvisionnement :
a-t-on connu des incidents et dans quels domaines, quelles améliorations
seraient souhaitables. Son but principal est naturellement de faire
rectifier les défauts de fonctionnement ou d'organisation constatés.
Il
respecte également les contraintes précédentes :
- le cadre contractuel :
bien relire le contrat et veiller à ne pas se mettre en porte à faux par
rapport à ce dernier ;
- les responsabilités du
fournisseur : ce dernier
est en particulier prévenu à l'avance et donner son accord (la
possibilité de mener ces audits devra d’ailleurs être bien prévue dans
les clauses générales du contrat ou de la commande).
Dans ces conditions, les
audits réguliers des fournisseurs sont utiles et efficaces pour éviter les
incidents sur les approvisionnements critiques et pour résoudre les
problèmes d'approvisionnements. Ils contribuent fortement à sensibiliser
les fournisseurs et sous-traitants à la nécessité de tenir leurs
engagements et de soigner les livraisons.
L'expérience démontre par ailleurs que les problèmes proviennent
souvent aussi de dysfonctionnements chez l'acheteur lui-même : cahier des
charges peu clair, demande de délais impossibles, oublis, mauvaise
information du fournisseur… L'audit est alors une excellente méthode pour
rectifier la situation en interne.
Il s'agit essentiellement
des audits menés par les organismes certificateurs.
Ces audits
ont théoriquement avoir le même objectif que les audits seconde
partie,
c’est-à-dire vérifier que l'entreprise assure bien la qualité, au
nom de la collectivité. On peut toutefois
s'interroger à ce sujet lorsqu'on constate que la certification est basée
actuellement sur la conformité formelle à la norme…
On constate certes que,
dans les faits, certains organismes certificateurs ont bien réalisé que
leurs vrais clients étaient les acheteurs et que ceux-ci n'avaient
nul besoin d'entreprises disposant d'un cursus de procédures mais bien de
fournisseurs efficaces respectant leurs engagements. Ils orientent donc
leurs audits vers la détection des risques de non-qualité plus que sur la
seule conformité formelle.
Mais généralement l'axe de certification demeure la conformité, ce
qui fait que les certificats n'apportent pas
aujourd'hui des garanties
réelles de qualité.
Les différentes cotations qualité objectives que nous avons consultées ne
montrent en général pas de net avantage en faveur des entreprises
certifiées.
Quelles
règles devraient suivre les audits de certification pour apporter
une réelle assurance de la qualité ?
- D'abord
commencer par examiner les indicateurs qualité de l'entreprise
(après en avoir vérifié "l'honnêteté"), ainsi que les actions menées
suite aux défauts. Cela montrerait déjà si l'entreprise a réellement une
volonté de progrès ou non — il faut juger aux actes et non aux méthodes
théoriques.
- Ensuite,
rechercher au cours de l'audit les causes structurelles des
problèmes rencontrés. On en déduit ainsi les améliorations à apporter.
-
Enfin, évaluer la gravité des problèmes de méthode et
d'organisation rencontrés en fonction des risques réels pour les
clients, de façon réaliste et pragmatique.
On peut penser que les
audits seraient ainsi à la fois plus utiles pour les audités, qui y
trouveraient de réelles sources de progrès, et pour la collectivité, en
distinguant les entreprises réellement motivées par la qualité, au-delà
de tout formalisme.
Toutefois, afin
d'atteindre la même rigueur que pour les audits internes, on pourrait
souhaiter les mesures complémentaires suivantes au niveau des organismes
certificateurs :
- un suivi de la qualité
des certificats fondé sur le suivi d'un panel d'acheteurs et des
indicateurs évaluant les taux de défauts des fournisseurs certifiés ;
- une grande réactivité
en cas de plainte d'un client d'un fournisseur certifié, en réalisant un
complément d'audit.
On peut penser que la
certification ISO retrouverait alors une vraie valeur technique et
commerciale.
Bien maîtrisé, il est
un vrai moyen de respiration de nos organisations
complexes et stressantes
modernes en évitant leur vieillissement et en détectant
l'apparition des dysfonctionnements
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